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Le catalogue Les Arts en France sous Charles VII éclaire le mitan du xve siècle, période méconnue du Moyen Âge

Au cœur du Quartier latin, dans ce Paris médiéval où les ruelles pavées murmurent les histoires du temps jadis, se dresse le musée de Cluny. Un joyau architectural, qui abrite l’âme vibrante du Moyen Âge et qui nous invite à remonter le temps… jusqu’au règne de Charles VII (1422-1461). Période méconnue de l’histoire de France et de l’histoire de l’art, elle recouvre une époque charnière, dont de nombreux chefs-d’œuvre illustrent la fécondité artistique : depuis les manuscrits enluminés jusqu’aux portraits de Jean Fouquet, en passant par la peinture parisienne d’André d’Ypres. Notre équipe a rencontré Séverine Lepape, directrice du musée, pour comprendre les enjeux de cette exceptionnelle exposition et de son catalogue, dont l’édition nous a été confiée.

Séverine Lepape, directrice du musée de Cluny et conservatrice générale (commissaire générale) © GrandPalaisRmnÉditions

En 1422, tandis que la guerre de Cent Ans fait rage dans le royaume, Charles VII se proclame roi de France, depuis la ville de Bourges, où il s’est exilé. Avec l’aide de Jeanne d’Arc, il mène des batailles décisives contre les Bourguignons et les Anglais, qui contestent sa souveraineté. En 1453, Charles VII devient « le Victorieux » lorsqu’il met fin aux luttes incessantes contre l’ennemi. « Ce règne, qui s’inscrit dans une période troublée, explique Séverine Lepape, porte en germe l’extraordinaire renouveau artistique de la fin du xve siècle, époque où grandit l’influence des arts flamands et italiens, en rupture avec le style gothique, dans un élan vers la Renaissance. C’est tout l’enjeu de cette exposition et de son catalogue : comprendre la production artistique dans un royaume de France alors cerné par deux pôles voisins prolifiques, les États bourguignons et l’Italie, qui ne cesseront d’influencer et d’imprégner les artistes français, prompts à réinterpréter leurs innovations esthétiques, à la manière d’un Jean Fouquet. »

« Rendre accessible et passionnant cet intervalle complexe de l’histoire, le décrypter, le synthétiser et en donner une représentation visuelle cohérente, c’était là toute la difficulté du catalogue, poursuit Séverine Lepape. Nous avons trouvé auprès de votre équipe éditoriale une grande qualité d’écoute.
Aussi, c’est un ouvrage qui accompagne vraiment l’exposition, qui en constitue un juste reflet. Son sommaire suit fidèlement le fil du parcours, et tous les auteurs pertinents que nous souhaitions interroger sont contributeurs.
Je salue notamment le travail de la graphiste, Line Martin-Célo. La maquette se distingue par une très riche iconographie et par l’agrandissement des manuscrits de petite taille, qui permet au lecteur d’en découvrir tous les détails. Au-delà de la mise en page des images, cette maquette, à la fois élégante et moderne, se met au service du propos et offre une lecture agréable. Pour évoquer les parchemins et les manuscrits enluminés du xve siècle, Line Martin-Célo a choisi une typographie parfaitement adaptée aux titres et aux lettrines des paragraphes : Minautor Lombardic, une création de Jean-Baptiste Levée pour Production Type. »

« Enfin, tout juste avant le bouclage, ajoute notre interlocutrice, il a été découvert au musée Pouchkine de Moscou, un médaillon complémentaire du cadre du célèbre Diptyque de Melun, l’autoportrait de Jean Fouquet, alors qu’il était réputé perdu à l’issue de la Seconde Guerre mondiale. Nous avons sollicité en hâte votre équipe pour intégrer cette nouvelle notice et sa photo en couleurs, tout à fait inédite ; et vos éditions ont été particulièrement réactives. Si l’œuvre n’a pas pu être intégrée dans l’exposition, elle est en revanche présente dans le catalogue, qui a également l’avantage d’en raconter l’histoire. Il n’est pas certain que tous les historiens d’art, en France comme en Europe, soient au fait de cette découverte. »

« Loin d’être consensuelle, l’histoire de l’art est une matière scientifique, vivante, qui s’exprime souvent à travers des voix discordantes, conclut Séverine Lepape. En tant que conservateurs d’une institution qui œuvre pour la recherche scientifique sur la civilisation médiévale, nous avons retenu certaines conclusions plutôt que d’autres sur des questions d’attribution. Par cet ouvrage, nous espérons ouvrir modestement la réflexion et présenter une réalité qui corrige des idées reçues sur cette période de l’histoire.
Le catalogue réussit à être tout à la fois un ouvrage de référence, au fait des dernières publications dans le domaine, mais aussi un ouvrage grand public et accessible, sans rien sacrifier aux exigences de la recherche scientifique. »